×

RDC : Faut-il un dialogue Kabila – Tshisekedi sous médiation CENCO–ECC ?

En visite à Bukavu, bastion stratégique sous l’influence du M23-AFC, l’ancien président Joseph Kabila Kabange est sorti de son long silence politique ce mercredi 25 juin. Face à une assemblée composée de jeunes, de leaders religieux et de figures de la société civile, il a réaffirmé son attachement à la paix en RDC et exprimé son ouverture à un dialogue avec le régime de Félix Tshisekedi, sous la médiation des églises catholique (CENCO) et protestante (ECC).

Une déclaration lourde de sens, dans un contexte de guerre ouverte à l’Est du pays, et alors que Kinshasa accuse Kabila de connivence avec les rebelles du M23-AFC, soutenus par le Rwanda. D’où la question : ce dialogue est-il nécessaire, voire crédible, dans les conditions actuelles ?

Un retour calculé sur la scène politique

Joseph Kabila, retiré du pouvoir depuis 2019, n’avait plus pris la parole publiquement depuis son message à la Nation de décembre dernier, dans lequel il formulait 12 propositions pour le retour de la paix et de la stabilité en RDC. À Bukavu, il a réaffirmé ces orientations et mis l’accent sur « le rôle crucial de la jeunesse dans la reconstruction du pays ».

Un jeune militant ayant participé à l’échange rapporte : « Il nous a dit qu’il est venu pour amener tout le monde à contribuer à la paix, chacun à sa manière ». Mais cette volonté affichée de paix est-elle perçue comme sincère dans une ville où le M23 impose toujours son influence militaire ?

Des médiateurs religieux aux antécédents mitigés

La CENCO et l’ECC, déjà médiatrices en 2016 lors de l’accord de la Saint-Sylvestre, sont les structures que Kabila propose à nouveau pour encadrer un éventuel dialogue. Ce choix, loin d’être anodin, vise probablement à rétablir une forme de légitimité morale à sa démarche. Mais ces institutions peuvent-elles encore jouer le rôle de pont entre deux régimes qui se soupçonnent mutuellement d’aggraver la crise sécuritaire ?

Un dialogue controversé dans l’opinion

Du côté du régime Tshisekedi, les accusations portées ces derniers mois contre l’ancien président restent lourdes. Des voix proches du pouvoir affirment que Kabila soutiendrait discrètement les groupes armés opérant à l’Est. Dès lors, dialoguer avec lui reviendrait, pour certains, à récompenser l’instabilité. D’autres y voient plutôt une voie de sortie politique dans un pays enlisé dans une guerre régionale.

Pour une frange de l’opinion publique, ce dialogue, bien que critiqué, pourrait offrir une plateforme pour désamorcer des tensions politiques latentes et construire une réponse nationale au chaos sécuritaire. Mais une autre partie estime qu’aucune paix durable ne peut se bâtir sans vérité sur les responsabilités des uns et des autres dans les crises en cours.

Une recomposition politique en marche ?

Qu’on l’apprécie ou non, cette apparition publique de Kabila à Bukavu relance les spéculations sur son rôle futur dans le paysage politique congolais. Veut-il redevenir un acteur central ou simplement préserver ses intérêts dans un pays en mutation ? En attendant, sa main tendue vers Kinshasa, dans un contexte aussi inflammable, risque de polariser davantage le débat national.

Reste à savoir si le président Tshisekedi jugera l’initiative recevable, ou s’il y verra une tentative de récupération politique sur fond de guerre larvée.

Rédaction

Share this content:

Laisser un commentaire