Quatorze jours se sont écoulés depuis le départ du lieutenant-général Johnny Luboya N’kashama, gouverneur militaire de l’Ituri, officiellement annoncé pour une mission de deux semaines à Kinshasa. Parti le 12 août dernier, l’homme fort de l’Ituri n’a toujours pas regagné Bunia, contrairement à ce que son porte-parole avait laissé entendre lors de son envol depuis l’aéroport Murongo à Bunia.

Ce silence prolongé nourrit aujourd’hui rumeurs et interrogations, aussi bien au sein de la classe politique locale que parmi la société civile. Alors que l’opinion s’attendait à une communication officielle marquant soit son retour, soit l’extension formelle de sa mission, rien ne filtre de la part de l’exécutif provincial.

Une mission annoncée comme brève

Selon ses proches collaborateurs, le déplacement du gouverneur militaire devait s’inscrire dans le cadre d’une harmonisation des stratégies sécuritaires et d’une réception de nouvelles directives de la haute hiérarchie. Officiellement, la durée était fixée à deux semaines.

Mais à l’expiration de ce délai, aucune cérémonie d’accueil ni même un signal discret (pratique pourtant habituelle lors de ses précédents voyages) n’a été observé. L’absence de communication alimente dès lors l’hypothèse d’un séjour prolongé imposé, voire d’une rétention stratégique à Kinshasa.

Continuité administrative mais incertitude politique

En attendant, l’administration provinciale continue à fonctionner sous la houlette du vice-gouverneur policier, garant d’une certaine stabilité institutionnelle. Toutefois, cette gestion intérimaire ne dissipe pas les doutes sur l’avenir immédiat de Luboya : prolongation de mission, rappel disciplinaire, voire repositionnement dans l’appareil militaire ?

La persistance du mutisme autour de sa situation traduit soit une volonté politique de temporiser, soit un malaise au sommet de l’État. Certains observateurs évoquent également la possibilité d’une mutation ou d’une promotion, alors que d’autres parlent d’un «passage au grill» lié aux résultats mitigés de l’état de siège.

Un contexte sécuritaire délicat en Ituri

Ce départ prolongé intervient alors même que la province connaît un redéploiement stratégique des forces de défense et de sécurité. De nouvelles unités, venues d’autres provinces, ont été déployées en surnombre à Bunia et dans d’autres entités sensibles de l’Ituri. Une présence renforcée qui, selon plusieurs sources locales, s’accompagne de certaines dérives dans l’exercice des missions de sécurisation.

L’absence prolongée du gouverneur militaire pourrait donc peser sur la coordination de ces opérations, tout en exposant la population à davantage d’incertitudes.

Vers un tournant ?

Au-delà d’un simple retard, le séjour de Luboya à Kinshasa semble désormais porteur d’enjeux plus profonds. S’agit-il d’un ajustement stratégique du pouvoir central sur la gouvernance sécuritaire de l’Ituri ? Ou d’un signal annonciateur d’un changement imminent dans le commandement ?

Seule une communication officielle viendrait lever le voile sur ce mystère. En attendant, l’opinion en Ituri oscille entre attente et spéculations, consciente que l’avenir de son gouverneur militaire pourrait se décider loin de Bunia, dans les cercles fermés de Kinshasa.

Rédaction